Présentation

CPPPC est un blog de CRITIQUES (fragmentaire) DES PRODUITS, PRATIQUES & POLITIQUES CULTURELLES.

"Des goûts et des couleurs on ne discute pas... et pourtant on ne fait que ça !" (Nietzsche)


jeudi 21 novembre 2013

[Film] Guillaume et les garçons, à table !, de Guillaume Gallienne (2013)

Apparemment ce fut une pièce de théâtre, ici elle est incluse dans le film et en constitue la voie off, sans que l'on sache vraiment si l'on doit voir la pièce dans le registre documentaire ou dans le registre fictionnel, et sans compter que Guillaume Gallienne réalise le film, joue la pièce en one-man-show, interprète le rôle de Guillaume, et aussi celui de la mère de Guillaume.
Ce feuilletage de dispositifs fictionnels est un peu lourd, virant au nombrilisme, et peut-être s'agit-il de sa propre histoire, ou peut-être pas, et franchement...
On s'attache au Guillaume de la petite voix, moins celle du présent du théâtre que celle du présent du cinéma, qui raconte ce qu'il vit : ses pensées, ses réflexions, ses désirs, ses naïvetés, ses découvertes, etc.
Le film s'attaque aux préjugés sur l'homosexualité, qui serait détectable à travers certains signes, stigmatisant la personne concernée malgré elle : ainsi, toute sa famille est bien persuadée que Guillaume est homo.
Son mérite est de faire entendre la voix de Guillaume qui, lui, n'est ni homo ni hétéro, il ne se place pas du tout dans de quelconques cases. Il y a le rapport à sa mère (l'aime-t-elle ou pas, et plutôt comme ceci ou plutôt comme cela...), ce garçon anglais auquel il s'attache parce qu'il est gentil et charmant, un rapport compliqué aux chevaux, le sport qu'il n'aime ni ne comprend, son amour pour Sisi, son identification aux femmes, les jeux de mimétisme, etc.
Bref, il est dans les choses elles-mêmes, en bon schizo, ce qui s'exprime le mieux dans un malentendu très drôle avec sa mère. Tout triste, et alors que son frère vient de le balancer à la piscine, sa mère vient le consoler et lui demande ce qu'il y a. Il parle de cet anglais qui ne l'aime pas et sort avec cette pouf. La mère voulant le rassurer, lui dit qu'il y en a beaucoup qui sont heureux, des... Des quoi, justement ? Impossibilité pour la mère de le dire finalement autrement qu'avec des mots allant dans la saleté et une nervosité croissante (des hommes qui aiment des hommes/des homos/des pédés), et impossibilité pour Guillaume d'imaginer, ce qui va de soi pour la mère, cette catégorie molaire tandis qu'il se meut depuis toujours dans le moléculaire.
Suit, plus loin, un moment émouvant où trouve le moyen d'entrer de monter à cheval, de ne plus avoir peur. Mais déjà, il y en a toute une couche sur le fait de surmonter sa peur et sur la psychanalyse, moquée avec tous les clichés habituels (tout le long du film d'ailleurs les clichés s'accumulent), mais néanmoins utile.
Au final, Guillaume aurait pu devenir homo, encore qu'il était dans le seul devenir et non dans le résultat identitaire, du fait de dispositions personnelles stigmatisées par une famille qui les a créées, mais se révélera et se revendiquera hétéro, dans un retournement où l'homosexualité est donnée à comprendre comme une déviance, un dysfonctionnement.
Et c'est ce dernier Guillaume-ci qui monte l'ensemble, avec toutes ces caricatures, et ce destin fidèle aux désirs de papa et maman réconciliés dans la figure parentale (même si le père n'apparaît pas sur les plans du théâtre, au contraire de ses frères encadrant la mère et qui lui sont semblables).
Une appréciation au final mi-figue mi-raisin sur un film qui s'inscrit néanmoins d'abord dans les comédies à la française. Et celles-ci ne reposent-elles pas sur une trajectoire schizo entre et menacée par des ensembles molaires qu'elle finit par rejoindre ?

Aucun commentaire: